La détresse informatique des associations étudiantes
Par Mathieu le mercredi 27 octobre 2010, 21:27 - Philosophie - Lien permanent
Étant dans le milieu étudiant depuis un certain temps, et ayant eu l'occasion de travailler avec le milieu associatif pour la réalisation de sites web, et la maintenance et la mise en œuvre d'outils informatique en général, j’ai put constater la détresse informatique de la plupart des associations étudiantes, à un point que j'en suis venu à me demander si c'était le cas pour toutes les associations (sauf les associations d'utilisateurs de l'informatique, quoique...), et je crains fort que la réponse soit également positive.
Ce billet va tenter de résumer ce qui me désespère tous les jours, ce n'est bien sûr pas de la faute des responsables de ces associations, souvent dépassés par la technique, ou manquant de moyen financiers et humains pour mettre en œuvre une véritable politique de gestion de leurs ressources informatiques, de leur site web aux données membre, en passant par leur carnet d'adresse ou leurs méthodes de rendez vous.
Ce billet ne vise absolument personne, et les liens fournis à titre d'exemple ne sauraient engager ma responsabilité vis à vis des personnes qui pourraient se sentir visées par mes propos, d'ailleurs, ces propos n'engageraient que moi, et non les associations dont je fais, ou ferait partie.
Encore une fois, ce billet est un pavé dans une mare trop trouble pour qu'on puisse en tirer des conclusions générales, il est de plus fortement temporel, dans le sens où ce que je dis à ce jour, ou les exemples que je vais montrer ne seront peut être plus valables ou en corrélation avec mes propos dans quelque temps.
1. Le site web
Commençons par ce que je connais le mieux : les sites web. En tant qu'informaticien (ou du moins étudiant en informatique) compétent (je l'espère) dans le domaine des technologies web, je suis toujours sidéré de la vacuité des sites web associatifs, quand ce n'est pas leur abandon le plus total.
Avant d'essayer d'expliquer pourquoi, je vais commencer par dresser un constat : la plupart des associations étudiantes, surtout les jeunes assos mais aussi certaines associations plus anciennes, se tournent pour la création de leur site web vers les outils "tout prêts", payant la facilité du prix de leur représentativité et de leur liberté vis à vis de ces outils et réseaux. Pour les associations étudiantes cela va du site fait avec DreamWeaver aux plateformes comme MySpace ou BlogSpot et Facebook pour les réseaux sociaux.
Constatation immédiate et attendue : les associations se tournent vers les outils qu'ils connaissent ou utilisent, parfois demandent à "celui qui sait", qui ne fait ne sait pas grand chose, à part utiliser photoshop.
On peut émettre plusieurs critiques avant d'en venir aux conséquences de ces choix :
- L'utilisation des réseaux sociaux pour rester en contact proche avec ses membres c'est une bonne chose, mais ça ne suffit pas non plus, l’instantanéité du réseau fait perdre toute la vocation « vitrine » que représente un site web classique. Ainsi, comme contacter les responsables d'une asso qui n'a pour seul site web un profil Facebook ? Lui envoyer une message sur Facebook ? Encore faut il avoir un compte Facebook... Oui, les gens qui n'ont pas de compte Facebook ça existe, sisi je vous assure.
- Un simple site avec Dreamweaver ou Adobemachin peut fournir une vitrine avec les informations sur l'association, mais le plus souvent non seulement ces sites sont assez peu mis à jour, ne contiennent pas les informations actualisés de l’association, ni les nouvelles, et leur design est ... comment dire ... laissant à désirer. Ben oui, on va pas demander à ces outils de faire des sites web professionnels.
- Les blogs comment Blogspot ou Wordpress sont le plus souvent bourrés de publicités, ce qui ne fait pas très crédible, et nuit également au confort visuel, réduisant le temps que passe l'utilisateur sur le site, et le nombre de personnes qui pourraient avoir envie d'y retourner.
Les conséquences à court terme sont un manque de communication envers l'extérieur, qui peut également provoquer un essoufflement de l'association à plus ou moins long terme. En effet, comment attirer de nouveau membres lorsque la communication externe à l'association est défaillante ? Comment attirer des entreprises pour un partenariat ? Comment avoir une crédibilité lors des demandes de subventions ?
Pour plus de compléments sur ce sujet bien spécifique, je vous renvois aux billets que j'ai publié sur le blog des développeurs du site du BDE Saint Jérôme, dont j'assure actuellement la maintenance :
2. Les réunions et la coordination
Le plus souvent les associations étudiantes ne connaissent pas les outils de travail collaboratif, et ne les utilisent donc pas. Leurs moyens de communication sont : le texto de groupe, l'email de masse, le forum (quand on a de la chance). Bien peu ont un planning fixé, et le plus souvent l'action de l'association se résume à une somme d'initiative individuelle plutôt qu'à un vrai travail en groupe.
Cela a pour conséquence la planification de réunions la veille pour le lendemain, où l'on ne fait que présenter les choses accomplies sans l'accord du CA, par initiative locale, et cela se résume à s'auto-féliciter d'avoir si bien fait les choses, sans concertation, sans accord, sans travail de groupe.
C'est mauvais à la fois pour pouvoir terminer les projets commencés, pour la crédibilité vis à vis des membres, et pour l'intégrité de l'association, qui risque la création de conflits internes, de séparation, de retrait des membres en masse, etc.
Alors qu'une bonne politique de gestion du calendrier, un endroit où les membres responsables de l'association peuvent se réunir et discuter, échanger en dehors des réunions, relire les compte rendus de réunion et s'attribuer des tâches, pouvoir réaliser un feedback en temps réel sur ce qui a été fait et reste à faire, bref en un mot une bonne politique de coordination via un outil informatique adapté (un groupware par exemple) n'est pas si difficile à mettre en place, sous réserve qu'il existe quelqu'un pour le mettre en place, et que tous les responsables soient d'accord pour l'utiliser, et qu'ils l'utilisent !
3. La gestion des membres et la confidentialité
Voici un autre point vraiment critique : la gestion des données membres, sur ce point là, contrairement aux autres, bien souvent la politique de gestion de ce listing est inexistante. Si en général les associations arrivent assez bien à collecter les informations personnelles de leurs membres (nom, age, cotisation, etc), il en est tout autrement de la politique de confidentialité des données. Qui a accès au listing ? Dans quelles circonstances ? Que faire des données membre à la fin de l'année ? Quelles utilité peuvent avoir ces informations ? Qu'es ce qu'on a le droit d'en faire ?
Toutes ces questions, beaucoup ne se les posent pas, et cela a pour conséquence la fuite des informations des membres, de manière plus ou moins grave, mais aussi la fuite des informations de contact que peuvent avoir les associations dans le cadre de partenariats, au profit d'autres associations. Cela a pour conséquence de dé-crédibiliser l'association, provoquer une fuite d'informations qui la vide de son originalité (oui, si toutes les autres associations peuvent avoir le partenariat dont profite l'association originale, il y a fort à parier que ce partenaire préférera l'association qui ne fait pas fuiter son contact à tout le monde)
C'est grave en terme de sécurité et de confidentialité des données, c'est grave au niveau légal et moral. C'est quelque chose qui est à mon avis très répandu, et qui est le point névralgique de toutes ces petites associations qui ne prennent pas assez au sérieux la gestion de leurs données informatisées.
4. Les archives de l'association
C'est un problème très fréquent dans les associations étudiantes, qui de par leur particularité sont particulièrement volatiles, les membres responsables changent souvent, et il est assez difficile de repartir sur le travail de l'année précédente pour continuer d'avancer plutôt que de devoir tout recommencer de zéro. La cause ? Une mauvaise gestion des archives. Cela peut être des archives des compte rendus de réunion, des archives des contacts, des archives des anciens membres, des archives des chèques encaissés l'année précédente, etc.
Cela va en général de pair avec la gestion des données membres, et devrait être assuré par le secrétaire de l'association tous les ans. Mais encore faut il que ce dernier soit compétent, au courant de ce qui doit être fait pour assurer la pérennité des données, et qu'il soit responsable afin de ne pas briser la « chaîne » des sauvegardes.
Les conséquences à court terme sont une perte des contenus des compte rendus, une perte des contacts qui auraient put être fournis pendant ces réunions, une désorganisation au niveau des tâches à accomplir. C'est d'autant plus grave dans une équipe composé de plus d'une dizaine de personnes qui doivent être au courant de ce qui se passe, même lorsqu'ils ne peuvent pas assister aux réunions. De manière plus générale, la perte des contacts des anciens membres, dans une association étudiante, prive l'association des contacts fructueux qui pourraient être fait par ce biais, et empêche ces anciens membres de revenir avec nostalgie et constater que « rien n'a changé ».
5. Conclusion
Mais au fond, comment venir en aide à toutes ces associations manquant de moyens ? Une asso de quartier n'a pas un seul informaticien compétent parmi ses membres ? Une association d'étudiants en sciences n'a pas un seul geek dans ses membres ? Je refuse de le croire, je crois plutôt que c'est un manque de motivation pour ces derniers de s'impliquer dans ces associations, voire un certain rejet de la part de ces associations vis à vis de celui qui va commencer par leur dire qu'ils ont fait n'importe quoi pour ensuite leur proposer de mauvais outils, faute de connaître les bons.
Mais ça n'existe pas un site web communautaire à destination des responsables d'associations proposant des conseils relatifs à la gestion de leurs ressources informatiques ? Comment gérer une liste de membres, ce qu'il faut savoir vis à vis de la CNIL, comment planifier des réunions, comment améliorer la communication interne et la communication externe, comment monter rapidement et avec peu de frais un site web potable, l'importance de la maîtrise des réseaux sociaux, etc. Non, vraiment pas ? Si quelqu'un veut lancer le projet avec moi, je dis un grand OUI tout de suite !
Bref, si ça vous branche, n'hésitez pas à me contacter, je n'aurais pour ma part ni l'envie ni le temps de lancer le projet tout seul, mais avec un ou plusieurs partenaires c'est différent.
Commentaires
On pourrait quasiment dire la même chose au sujet des retrouvailles d'anciens étudiants. D'ailleurs, il se trouve que dans le cas des anciens qui ont fini la même année que moi à l'école secondaire où j'ai étudié, tout ce qu'on a c'est un groupe Facebook... Or, Facebook me rebute et donc, la seule façon que je verrais pour contacter ce groupe, c'est de passer par ma cousine qui, elle, est sur FB et qui est du même groupe de finissants que moi.
Pour en revenir aux associations étudiantes, ça me rappelle qu'un des anciens CA de l'association étudiante du cégep où j'ai étudié avait ouvert un forum sur Forumactif pour ses activités... le forum avait depuis été laissé à l'abandon pendant un an ou deux, après la fin de l'année et vient juste d'être repris par le comité de cette année et tous les anciens messages ont été archivés. T'as juste à taper "AGEECBC" sur Google.ca et tu trouveras les pages relatives à l'asso en question.